Neropolis

Hubert MONTEILHET : Néropolis.

"... À l'occasion d'un Salon du Livre au Grand Palais, je suis tombé en arrêt sur un ouvrage~ fascinant : une thèse du regretté Georges Ville, publiée par l'École de Rome : La gladiature romaine, des origines au milieu du IIe siècle de notre ère. Lisant cet admirable travail, je me répétais : si Sienkiewicz avait pu assimiler une pareille science, que n'aurait-il pas fait ? J'avais effectivement été quelque peu déçu par mes récentes relectures de Quo Vadis ?. Si la qualité romanesque restait intacte à mes yeux, l'histoire, la vraie, n'était plus au rendez-vous. Il me semblait que l'auteur avait agité des héros de convention devant un décor romain plein de trous. Et me gênait aussi un parti pris hagiographique, qui s'expliquait sans doute par le désir d'opposer une Pologne catholique à une Russie schismatique - déjà puissance occupante !
Doutant cependant de pouvoir refaire Quo Vadis ?, j'ai caressé d'abord l'idée d'un roman tout nourri de gladiature, mais pour m'apercevoir bientôt qu'une telle tentative n'aurait été intelligible que si un nombre de pages considérable avaient été consacrées à faire revivre tout un indispensable contexte. Et puisque contexte il fallait par la force des choses, pourquoi pas un roman plus ambitieux, capable de ressusciter les moindres aspects de la Rome antique ? Et au fond, pourquoi pas un nouveau Quo Vadis ?, en harmonie avec les derniers progrès des connaissances historiques ? Comme l'avait bien vu Sienkiewicz, les temps néroniens n'étaient-ils point passionnants ? Quel thème que ce heurt entre une civilisation de l'homme et de ses plaisirs et la Cité de Dieu, annoncée par des apôtres encore en vie mais près du supplice ! (...)
On m'a souvent demandé si j'avais voulu réhabiliter Néron. Mais réhabiliter ou discréditer un personnage historique n'est pas faire œuvre d'historien, puisque l'attitude présuppose une intention a priori. Je me suis borné à présenter le Néron que les plus récents travaux - ceux de l'historien roumain Cizek, en particulier - nous révèlent ou nous suggèrent. Néron ne nous est guère connu que par les diffamations plus ou moins calomnieuses de ses ennemis aristocrates ou chrétiens. Il était légitime de discerner entre les lignes comme au travers de certains faits un Néron plus humain et plus normal.
De même en ce qui concerne les premiers chrétiens, le me suis efforcé de dépasser une hagiographie saint-sulpicienne pour atteindre une réalité qui me semble à tout prendre plus édifiante encore. L'humilité, les imperfections de l'instrument, ne font-ils pas ressortir, pour le croyant, toute l'étendue miraculeuse de la grâce divine ?" (Hubert Monteilhet)

* Néropolis d'Hubert MONTEILHET est paru aux Éditions Juliard (1984)

Aussi disponible :
* Hubert MONTEILHET, Néropolis, Pocket N° 3545, Paris, 1997